SYNODE DES ÉVÊQUES
XIIIème ASSEMBLÉE GÉNÉRALE ORDINAIRE
LA NOUVELLE ÉVANGÉLISATION POUR LA TRANSMISSION DE LA FOI CHRÉTIENNE
LINEAMENTA
CITÉ DU VATICAN 2011
TABLE DES MATIÈRES
1.L'urgence d'une nouvelle évangélisation
2. Le devoir d'évangéliser
3. Évangélisation et discernement
4. Évangéliser dans le monde d'aujourd'hui, à partir de ses défis
Questions
CHAPITRE I
LE TEMPS D'UNE « NOUVELLE ÉVANGÉLISATION »
5.«Nouvelle évangélisation». Signification d'une définition
6. Les scénarios de la nouvelle évangélisation
7. En chrétiens face à ces nouveaux scénarios
8. «Nouvelle évangélisation» et besoin de spiritualité
9. Nouvelles façons d'être Église
10. Première évangélisation, sollicitude pastorale, nouvelle évangélisation
Questions
CHAPITRE II
PROCLAMER L'ÉVANGILE DE JÉSUS-CHRIST
11.La rencontre et la communion avec le Christ : but de la transmission de la foi
12. L'Église transmet la foi qu'elle vit elle-même
13. Parole de Dieu et transmission de la foi
14. La pédagogie de la foi
15. Les Églises locales, sujets de la transmission
16. Rendre raison : le style de la proclamation
17. Les fruits de la transmission de la foi
Questions
INITIER À L'EXPÉRIENCE CHRÉTIENNE
18.L'initiation chrétienne, processus évangélisateur
19. Première annonce en tant qu'exigence de nouvelles formes du discours sur Dieu
20. Initier à la foi, éduquer à la vérité
21. L'objectif d'une « écologie de la personne humaine »
22. Évangélisateurs et éducateurs, parce que témoins
Questions
23.Le fondement de la «nouvelle évangélisation» dans la Pentecôte
24. La «nouvelle évangélisation», vision pour l'Église d'aujourd'hui et de demain
25. La joie d'évangéliser
AVANT-PROPOS
« Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit, et leur apprenant à observer tout ce que je vous ai prescrit » (Mt 28, 19-20). Avant de monter au ciel et de s'asseoir à la droite de Dieu le Père (cf. Ep 1, 20), Jésus-Christ a envoyé ses disciples proclamer la Bonne Nouvelle au monde entier. Ils représentaient un petit groupe de témoins de Jésus de Nazareth, de sa vie ici-bas, de son enseignement, de sa mort et, surtout, de sa résurrection (cf. Ac 1, 22). C'était une tâche immense, au-dessus de leurs possibilités. Pour les encourager, le Seigneur promet la venue du Paraclet, que le Père enverra en son nom (cf. Jn14, 26) et qui les «introduira dans la vérité tout entière » (Jn16, 13). En outre, il assure qu'il sera constamment présent : « Et voici que je suis avec vous pour toujours jusqu'à la fin du monde » (Mt 28, 20).
Après l'événement de la Pentecôte, lorsque le feu de l'amour de Dieu s'est posé sur les apôtres (cf. Ac 2, 3) réunis en prière « avec quelques femmes, dont Marie mère de Jésus » (Ac 1, 14), le mandat du Seigneur Jésus a commencé à se réaliser. À l'origine de l'Église – missionnaire par sa nature –, il y a l'Esprit Saint que Jésus-Christ donne en abondance (cf. Jn 3, 34). En effet, tout de suite après avoir reçu l'onction de l'Esprit Saint, saint Pierre Apôtre « alors, debout [...] éleva la voix » (Ac2, 14) proclamant le salut au nom de Jésus, que « Dieu [...] a fait Seigneur et Christ » (Ac2, 36).
Transformés par le don de l'Esprit, les disciples se sont dispersés dans le monde connu à l'époque, et ont diffusé l'«Évangile de Jésus-Christ, Fils de Dieu » (Mc 1, 1). Leur annonce a atteint les régions du bassin de la Méditerranée, de l'Europe, de l'Afrique et de l'Asie. Guidés par l'Esprit, don du Père et du Fils, leurs successeurs ont poursuivi cette mission, qui reste actuelle jusqu'à la fin des siècles. Tant qu'elle existe, l'Église doit annoncer l'Évangile de la venue du Royaume de Dieu, l'enseignement de son Maître et Seigneur et, surtout, la personne de Jésus-Christ.
Le mot « Évangile », τò εúαγγέλιον, était déjà utilisé à l'époque de l'Église naissante. Saint Paul l'emploie souvent pour indiquer la prédication de l'Évangile, que Dieu lui a confiée (cf. 1 Te 2, 4) « au milieu d'une lutte pénible » (1 Te 2, 2), et toute la nouvelle économie du salut (cf. 1 Te 1, 5 et suiv.; Ga 1, 6-9 et suiv.). Outre que par Marc (cf. Mc 1, 14.15; 8, 35; 10, 29; 13, 10; 14, 9; 16, 15), le mot Évangile – la Bonne Nouvelle – est aussi utilisé par l'évangéliste Matthieu, souvent dans la combinaison spécifique « l'Évangile du Royaume » (Mt 9, 35; 24, 14; cf. 26, 13). Saint Paul emploie aussi l'expression (εúαγγελίσασθαι, cf. 2 Co 10, 16), que l'on retrouve également dans les Actes des Apôtres (cf. en particulier Ac 8, 4.12.25.35.49) et dont l'usage s'est largement développé dans l'histoire de l'Église.
Dans les temps plus récents, le mot évangélisation se réfère à l'activité ecclésiale dans son ensemble. L'Exhortation apostolique Evangelii nuntiandi, publiée le 8 décembre 1975, comprend dans cette catégorie la prédication, la catéchèse, la liturgie, la vie sacramentelle, la piété populaire et le témoignage de la vie chrétienne (cf. EN 17, 21, 48 et suiv.). Dans cette Exhortation, le Serviteur de Dieu Paul VI, a regroupé les résultats de la Troisième Assemblée Générale Ordinaire du Synode des Évêques, qui s'était tenue du 27 septembre au 26 octobre sur le thème L'évangélisation dans le monde moderne. Le document a imprimé un dynamisme notable à l'action évangélisatrice de l'Église au cours des décennies suivantes, action accompagnée d'une authentique promotion humaine (cf. EN 29, 38,70).
Dans le vaste contexte de l'évangélisation, une attention particulière a été réservée à l'annonce de la Bonne Nouvelle aux personnes et aux peuples qui ne connaissent pas encore l'Évangile de Jésus-Christ. C'est à eux que s'adresse la missio ad gentes qui a caractérisé l'activité constante de l'Église, même si elle a connu des moments privilégiés à certaines périodes de l'histoire. Il suffit de penser à l'épopée missionnaire sur le continent américain ou, par la suite, aux missions en Afrique, en Asie et en Océanie. Avec le Décret Ad gentes, le Concile Vatican II a souligné la nature missionnaire de toute l'Église. Selon le mandat donné par son fondateur Jésus-Christ, non seulement les chrétiens doivent, par la prière et matériellement, soutenir les missionnaires, c'est-à-dire les personnes qui se consacrent à l'annonce aux non-chrétiens, mais ils sont aussi eux-mêmes appelés à contribuer à la diffusion du Royaume de Dieu dans le monde, chacun à sa manière et selon sa propre vocation. Un tel devoir devient particulièrement urgent au cours de la phase actuelle de mondialisation dans laquelle, pour différentes raisons, nombreuses sont les personnes qui ne connaissent pas Jésus-Christ et immigrent dans les pays de vieille tradition chrétienne, venant à se trouver en contact avec les chrétiens, témoins du Seigneur ressuscité dans son Église, et plus spécialement dans sa Parole et dans les sacrements.
Au cours de ses 45 années, le Synode des Évêques a traité le thème de la missio ad gentes lors de différentes Assemblées. D'une part, il a tenu présent la nature missionnaire de toute l'Église et, d'autre part, les indications du Concile Œcuménique Vatican IIqui, dans le Décret conciliaire Ad gentes, a parlé une nouvelle fois du souci missionnaire comme étant un objectif important de l'activité même du Synode des Évêques : « La charge d’annoncer l’Évangile par toute la terre étant en premier lieu l’affaire du corps épiscopal, le Synode des Évêques ou ‘Conseil stable d’Évêques pour l’Église universelle’ doit avoir, parmi les affaires d’importance générale, un souci spécial de l’activité missionnaire, qui est une charge très importante et très sacrée de l’Église » (AG29).
Au cours des dernières décennies, on a aussi parlé de l'urgence de la nouvelle évangélisation. Tenant compte de l'évangélisation comme l'horizon ordinaire de l'activité de l'Église, ainsi que l'action d'annoncer l'Évangile ad gentes, qui nécessite la formation de communautés locales ou Églises particulières – dans les Pays missionnaires de première évangélisation –, la nouvelle évangélisation s'adresse plutôt à ceux qui se sont éloignés de l'Église dans les Pays de vieille tradition chrétienne. Hélas, ce phénomène existe aussi – à des degrés différents – dans les Pays où la Bonne Nouvelle a été annoncée dans les siècles récents mais où elle n'a pas encore été suffisamment accueillie au point de transformer la vie personnelle, familiale et sociale des chrétiens. Une évidence qui a aussi été soulignée par les Assemblées Spéciales du Synode des Évêques au niveau continental, célébrées en préparation de l'Année Sainte 2000. C'est là un défi important pour l'Église universelle. C'est pourquoi, après avoir consulté ses frères dans l'épiscopat, le Saint-Père Benoît XVI a décidé de convoquer la XIIIème Assemblée Générale Ordinaire du Synode des Évêques sur le thème La nouvelle évangélisation pour la transmission de la foi chrétienne, qui se tiendra du 7 au 28 octobre 2012. Reprenant la réflexion réalisée jusqu'à aujourd'hui sur l'argument, l'Assemblée synodale aura pour but d'examiner l'actuelle situation dans les Églises particulières pour pouvoir tracer ensuite, en communion avec le Saint-Père Benoît XVI, évêque de Rome et Pasteur universel de l'Église, des manières et des expressions inédites de la Bonne Nouvelle à transmettre à l'homme d'aujourd'hui, avec un nouvel enthousiasme – caractéristique des saints, témoins joyeux du Seigneur Jésus-Christ, Celui qui était, qui est et qui vient (cf. Ap4, 8). Il s'agit là d'un défi de tirer, comme le scribe devenu disciple du Royaume des cieux, des choses nouvelles et des choses anciennes à partir du trésor précieux de la Tradition (cf. Mt 13, 52).
Les Lineamentaque nous présentons ici, élaborés avec l'aide du Conseil Ordinaire de la Secrétairerie Générale du Synode des Évêques, constituent une étape importante dans la préparation de l'Assemblée Synodale. À la fin de chaque chapitre, des questions sont proposées pour faciliter la discussion au niveau de l'Église universelle. En effet, les Lineamentasont envoyés aux Synodes des Évêques des Églises Orientales Catholiques sui iuris, aux Conférences Épiscopales, aux Dicastères de la Curie Romaine et à l'Union des Supérieurs Généraux, organismes avec lesquels la Secrétairerie Générale du Synode des Évêques entretient des rapports officiels. Ils entendent faciliter la réflexion sur le document, dans leurs structures respectives : diocèses, secteurs pastoraux, paroisses, congrégations, associations, mouvements, etc. Les réponses de ces organismes devront être résumées par les responsables des Conférences Épiscopales, des Synodes des Évêques, ainsi que des autres organismes mentionnés, et renvoyées à la Secrétairerie Générale du Synode des Évêques avant le 1er novembre 2011, Solennité de la Toussaint. Avec l'aide du Conseil Ordinaire, ces réponses seront soumises à une analyse attentive avant d'être intégrées dans l'Instrumentum laboris, le document de travail de la prochaine Assemblée Synodale.
En remerciant d'ores et déjà pour l'aimable collaboration, qui constitue un précieux échange de dons, d'intérêts et de soucis pastoraux, nous confions le déroulement de la XIIIèmeAssemblée Générale Ordinaire du Synode des Évêques à la maternelle protection de la Bienheureuse Vierge Marie, Étoile de la Nouvelle Évangélisation. Que son intercession obtienne pour l’Église la grâce de se renouveler dans l'Esprit Saint pour pouvoir aujourd'hui mettre en pratique, avec un nouvel élan, le commandement du Seigneur ressuscité : « Allez dans le monde entier, proclamez l'Évangile à toute la création » (Mc16, 15).
Cité du Vatican, le 2 février 2011
en la fête de la Présentation du Seigneur au Temple
+ Nikola ETEROVIĆ
Archevêque titulaire de Cibale
Secrétaire Général